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jeudi 8 novembre 2018

La révolution numérique est en marche !

Confrontés aux vertigineuses chutes des ventes des éditions papier et des ressources publicitaires, les groupes de presse écrite régionale prennent enfin le virage digital.  Reste à trouver un nouveau modèle économique viable.


Comment arrêter l'hémorragie du compte d'exploitation ? Plusieurs quotidiens régionaux sont déjà en soins palliatifs entre redressements judiciaires et restructurations de la dernière chance.
Selon l'Observatoire 2019 de l'ACPM (Alliance pour les chiffres de la presse et des médias), la diffusion payée de la presse quotidienne régionale et départementale a régressé en 2018 de 3,74 %.  La PQN (presse quotidienne nationale) a un peu mieux résisté avec une baisse de 0,32 %.
Plusieurs titres se sont mis à affiner leur stratégie économique en jouant la carte de la diversification et l'accélération du passage au numérique. Une question de survie !
Si l'instantanéité de l'info favorise l'audience, elle accélère aussi l'érosion de la diffusion des éditions papier, devenues exsangues de recettes publicitaires.
Pour stopper l'hémorragie des trésoreries, des décisions douloureuses ont été prises.


La Nouvelle République du Centre-Ouest annonçait fin octobre 2018 une nouvelle saignée dans sa masse salariale. Quelque 107 postes (dont 32 journalistes) ne seront pas remplacés d'ici quatre ans.
Conséquences directes : la mise à l'arrêt d'une des deux rotatives et la suppression d'éditions locales qui faisaient la force du quotidien. Une stratégie de repli, estime le syndicat SNJ majoritaire dans l'entreprise.
La mutation digitale, qui vise un public jeune et urbain, s'engage aux forceps en misant sur l'évolution des modes de consommation alors que son lectorat reste très rural (à part les agglomérations de Tours et Poitiers).
La NR a attendu octobre 2017 pour passer du modèle tout gratuit au  paywall qui permet une consultation gratuite jusqu'à cinq articles de base et un accès payant pour les contenus estimés à forte valeur ajoutée. Il s'en est suivi une chute brutale de l'audience compliquée par des problèmes techniques qui ont relégué l'appli mobile en queue des classements de toute la PQR.
La diffusion de la NR, réduite à cinq départements (Indre, Indre-et-Loire, Loir-et-Cher, Vienne et Deux-Sèvres), est tombée à 151.705 exemplaires, en baisse de 1,68 %.
Une situation morose en dépit de deux derniers exercices bénéficiaires (2,8 M€ fin 2017 et 3,6 M€ fin 2016) avec un chiffre d'affaires en baisse (73,7 M€ en 2017 au lieu de 46,6 en 2016).
Ce contexte rappelle le lourd plan social de 2009 (181 postes supprimés) sur fond de fermeture de son édition du Cher qui perdait 2,5 M€ par an et la mutualisation de ses moyens avec Centre-Presse dans la Vienne (ce quotidien racheté au groupe Hersant en 1996 a vu sa diffusion divisée par deux en 12 ans. Elle est tombée à 10.369 ex. - 8,33 %).
Quant au groupe Centre France qui, il y a près de dix ans, avait évité à la NR la cessation de paiements en entrant dans son capital (16 %), il reste de marbre face aux difficultés de son partenaire...

L'attentisme de Centre France (8 quotidiens, 10 hebdos régionaux) s'explique aussi par la situation encore fragile du groupe auvergnat.
En 2013, après la suppression de 250 emplois, un plan de développement stratégique appelait à la transformation numérique, la diversification et l'événementiel. Le seul numérique devant atteindre 15 à 20 % du chiffre d'affaires en quelques années.
En 2017, le groupe annonçait des résultats en progression (+ 6,3 %) grâce au développement de ses différentes activités et à la maîtrise des coûts fixes.
Une nouvelle structure d'actionnariat avec la Fondation Varenne (42 % de parts non cessibles), et le désengagement de la famille Caillard, a conforté son indépendance mais la diffusion de ses quotidiens poursuit sa chute de manière inquiétante (La Montagne - 4,19 % à 154.568 exemplaires ;  Le Populaire - 5 % à 32.198 ex. ; La République du Centre - 4 % à 29.537 ex. ; Le Berry républicain - 3,53 % à 28.272 ex. ; L'écho républicain  - 4,52 % à 25.052 ex.  ; L'Yonne républicaine - 4,29 % à 25.098 ex. ; Le Journal du Centre - 4,51 % à 22.636 ex. ; L'Eveil de la Haute-Loire - 4,56 % à 10.287 ex.).
Des branches mortes ont été coupées : en 2015 la chaîne iC1 à Clermont (26 M€ de pertes et 250 suppressions de postes), le sabordage en avril dernier de l'hebdo La Gazette de la Haute Loire, tombée à 2.500 exemplaires, après 17 années d'existence.
En 2017, un signal fort du virage numérique était lancé par le rachat à Décathlon du site pecheur.com  spécialisé dans la vente en ligne d'articles de pêche et chasse.
Dans le groupe la transformation digitale est encouragée au sein des rédactions via le LAB Centre France.
La Lettre A annonce début avril 2019 un plan de départs à Centre-France-La Montagne, pour "rajeunir la rédaction".

D'autres groupes de PQR optent aussi pour des électrochocs :

EBRA (Est-Bourgogne-Rhône Alpes), 9 quotidiens, 4 hebdos régionaux, premier groupe par sa diffusion, propriété du Crédit Mutuel, diffuse dans 23 départements.
En juin 2019, pour accélérer sa réorganisation et le passage au "digital first", EBRA annonce son projet de PSE visant 386 postes et la mutualisation de services de fonctions support entraînant la création de 284 postes au siège de l'Est Républicain dans une filiale commune dénommée Ebra services.
Sont concernés les services de création graphique, la pagination, les annonces légales, la maintenance informatique, le digital et la relation clients.
Cette recentralisation sera proposée en priorité aux salariés du groupe et devrait être opérationnelle au 1er janvier 2021. Au total, une centaine de licenciements est prévue.
Avec 55 M€ de pertes en 2016 (et la disparition en 2015 de 96 postes au Bien Public et au Journal de Saône-et-Loire) la restructuration avait déjà commencé en 2018 : une régie publicitaire commune a été créée, deux imprimeries ont été fermées, à Woippy, siège du Républicain Lorrain près de Metz et à Mulhouse à L'Alsace. L'impression a été transférée à Houdemont sur les rotatives de L'Est républicain.
Au Dauphiné, un plan de départs volontaires est porté de 120 à 160 postes d'ici 2019. Les DNA à Strasbourg et L'Alsace à Mulhouse vont fusionner.
Pour le DG Philippe Carli, ex-président de Siemens puis DG du groupe Amaury, l'enjeu est clair : " les revenus du numérique représentent moins de 3 % du chiffre d'affaires. Nous souhaitons tripler ces revenus ".
Pour 2017-2018, les plus fortes baisses de diffusion concernent Vosges Matin - La Liberté de l'Est (- 4,55 % à 33.005 ex.), Le Dauphiné 
(- 3,77 % à 193.856 ex.), Le Journal de la Haute-Marne (- 3,62 % à 20.254 ex.), Le Progrès (- 3,47 % à 169.524 ex.) et L'Est républicain (- 3,3 % à 115.846 ex.).

Lire : le groupe Ebra projette de supprimer 386 postes (Le Monde, 7/07/2019)


Le groupe Sipa-Ouest France (5 quotidiens, 77 hebdos régionaux et 15 gratuits avec sa filiale Publihebdos) envisage lucidement son avenir :
" Ouest France va perdre 80.000 exemplaires d'ici 2021 " estimait en 2018 Louis Echelard, président du directoire. En 2017, 55.000 lecteurs avaient déjà disparu soit plus de 7 % de l'audience du régional.
En septembre 2018, une grève dénonçait les mesures prises pour conforter la filiale des Journaux de Loire (Courrier de l'Ouest, Presse-Océan, Maine Libre) au détriment du navire amiral.
La réorganisation engagée moins d'un an après le décès de l'ancien président du groupe François-Régis Hutin, devait permettre la mutualisation des contenus, la suppression de 56 emplois, et la fermeture d'agences locales en Maine-et-Loire et Sarthe. Le projet a été momentanément suspendu le temps d'une concertation avec les représentants des personnels.
En Loire-Atlantique, où Presse Océan tente de résister (- 0,82 % à 27.749 ex.), son bureau de Saint-Nazaire doit être sacrifié pour ménager OF.
Pour 2017-2018, Le Maine Libre perd 3,08 % à 38.194 ex. La Presse de la Manche - 2,86 % à 20.044 ex. et Le Courrier de l'Ouest - 2,51 % à 84.677 exemplaires.
Dans le Finistère, les moyens rédactionnels et la pagination seront réduits face au leader Le Télégramme (190.475 ex. - 1,57 %) qui réussit à se maintenir sur le créneau de la culture bretonne.
Les abonnements numériques au site du quotidien de Morlaix, Brest et Lorient, lancé dès 1996, ne représentent pour l'instant que 2,5 % de sa diffusion.
La stratégie numérique du géant Ouest France vise à lancer d'ici fin 2019 une plateforme commune à plusieurs de ses titres. Déjà, la filiale Publihebdos édite depuis 2017 ses sites Actu, déclinaison d'hebdos locaux, 73 payants et 13 gratuits.
En 2019, en Loire-Atlantique, les sites du quotidien sont visités par près de 160.000 personnes chaque jour avec une audience en hausse de 25 %.
L'appli mobile du quotidien rennais domine actuellement toute la PQR avec plus de 6.784.000 visites mensuelles et le site ouestfrance.fr est classé 8e site national avec plus de 13.600.000 visiteurs uniques par mois (Médiamétrie mai 2018).

Jusqu'alors, le premier quotidien régional français (659.681 ex. - 2,43 %) était handicapé par les lourdes pertes financières (62 M€) de sa filiale Spir-Communication (presse gratuite d'annonces) qui plombait le groupe. La cotation en bourse a été suspendue fin 2016 mais Sofiouest - qui gère le patrimoine familial du groupe Sipa/Ouest-France, espère resservir un dividende à ses actionnaires en 2021.
Une erreur magistrale avait été commise en 2010, lorsque Spir céda ses 50 % de participation dans le site Le Bon Coin, au norvégien Schibsted, alors copropriétaire avec Sipa-Ouest France du gratuit 20 Minutes. En septembre 2018, Le Bon Coin annonçait son entrée en bourse courant 2019...
Le groupe Sipa-Ouest France consolide ses parts de marché publicitaires en prenant des participations dans les radios locales : 22 % dans Alouette FM, après Radio Cristal, Océance FM et Hit West.
Pour développer ses contenus économiques, l'agence API, a été acquise en septembre 2019. Elle est dirigée par Dominique Luneau, ancien rédacteur en chef de Presse Océan, qui avait démissionné de son poste de directeur délégué en 2009. API est actionnaire (12 %) de Télénantes, qu'il dirige depuis 2013. Le Crédit mutuel de Loire-Atlantique et du centre-ouest est actionnaire à 20 % de la chaîne.

Le groupe belge Rossel (7 quotidiens, 14 hebdos régionaux) a fait appel au Crédit Agricole, en 2011, pour entrer dans le capital (25 %) de La Voix du Nord. Il s'agissait d'accompagner la mutation numérique du quotidien (204.041 ex. - 1,13 %).
En 2017, un plan social entraîna 178 départs volontaires (dont 72 journalistes) - un quart des effectifs - et la vente du siège de Lille, en plein centre-ville. Des locaux sont désormais loués. En 2015, le quotidien du Nord a dégagé 5 M€ de marge bénéficiaire.
Trois quotidiens ont mordu la poussière cette année : Le Courrier Picard (- 4,19 % à 48.170 ex.) et Nord Eclair (- 6,76 % à 15.405 ex.). Libération-Champagne ne diffuse plus qu'à 3.514 ex. (- 6,19 %).
Le site de la VDN, qui avait du mal à décoller, a été revu début 2019 par l'ancien  chef du desk numérique du Parisien, Antoine Barret. Au Courrier Picard, un "lab" est animé au sein du cockpit numérique.
Le groupe Rossel cherche à développer ses recettes publicitaires et l'événementiel via une politique d'investissements dans les radios locales (RDL à Lens).

Jean-Michel Baylet, président du groupe 
La Dépêche-Midi Libre (dr)
Le groupe La Dépêche-Midi Libre (6 quotidiens, 3 hebdos régionaux, 1 bi-hebdo national), 5e éditeur de PQR par sa diffusion (310.535 ex.), sort d'une lourde restructuration (300 emplois supprimés) suite au rachat en 2015 des journaux du Midi. Un rachat au groupe Sud Ouest pour un peu plus de 15 M€, achetés en 2007 au groupe Le Monde au prix fort de 90 M€...
Midi Libre, L'Indépendant, Centre-Presse Aveyron, La Nouvelle République des Pyrénées, Le Petit Bleu du Lot-et-Garonne ont changé de mains avec à la clé un gros chantier industriel pour " rationaliser la production, coordonner les fonctions supports, sans fusion de rédactions, sans disparition de titres " explique José Bioscat, DG de La Dépêche qui régresse de 3,43 % cette année à 135.477 exemplaires, tandis que Midi Libre régresse de 4,72 % à 98.960 exemplaires.
Face à la réduction des effectifs engagée par la réorganisation liée à l'intégration de Midi Libre dans le groupe La Dépêche, un débrayage a eu lieu chez les journalistes le 29 mai 2019.
25 mutations ont été engagées, la charge de travail s'est alourdie alors que les effectifs ont été ramenés de 186 à 150 postes et le management du rédacteur en chef Olivier Biscaye est contesté.
L'ancien ministre radical Jean-Michel Baylet, figure de la franc-maçonnerie du Sud Ouest, redevenu président de son groupe de presse (l'intérim avait été confié à son ex-épouse Marie-France Baylet, compagne déclarée de Laurent Fabius), agit en véritable lobbyiste pour la profession et son entreprise. Début 2018, il devient président de l'Union de la presse en région qui réunit 64 quotidiens régionaux et départementaux. En septembre, il se rajoute la présidence de l'Alliance de la presse d'information générale, qui associe la presse hebdo régionale.
Le Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) lui a même octroyé une exceptionnelle subvention de plus de 3,4 M€ pour son changement de rotative (6 M€ d'investissement) qui déroge aux règles du Fonds. Déjà, en 2017, le fonds Google Digital News Initiative finançait "Robin", un système chatbot pour automatiser le dialogue entre abonnés numériques et la base de données locales...

Depuis 2016, la diversification digitale s'est engagée autour de la notion de service : l'appli Midi Tour (tourisme), Midiolympique.fr réseau social complémentaire du bi-hebdo éponyme consacré au rugby, et l'appli Toulouse à domicile, pour la livraison de restauration, en sont trois exemples.
Le site ladepeche.fr entièrement rénové en janvier 2019 propose une version "freemium".
Des tensions sont nées autour des dix jeunes journalistes recrutés à l'essai d'un an, au sein de l'agence Dépêche News. Leur statut de rédacteur multimédia est moins confortable que leurs confrères émargeant à la grille de la PQR.

Olivier Gerolami, présidait le groupe Sud-Ouest 
de janvier 2012 à mai 2019 (dr)
GSO, le groupe Sud Ouest (5 quotidiens, 3 hebdos régionaux) a annoncé le 10 juillet 2019 la mise en place d'un plan de départs volontaires pour 132 salariés, dont 20 journalistes.
Le bureau d'Angoulême sera fermé. Le quotidien bordelais était ultra minoritaire face à La Charente Libre, qui appartient aussi à GSO.
Alors que la santé financière était revenue (résultat consolidé de + 8,4 M€ en 2018, après + 5 M€ en 2017), des suppressions de postes avaient été annoncées dans les agences, avant d'être gelées.
Des assurances avaient été données en matière d'indépendance de la rédaction vis-à-vis des activités événementielles. L'été 2018 une motion de défiance avait été votée à 60 % par la rédaction du quotidien bordelais.

Après la sévère restructuration de 2013-2014 (126 postes supprimés) et la cession des journaux du Midi (tout en restant actionnaire à 33,4 %) qui a permis le désendettement du groupe, le projet d'entreprise 2016-2020 annonçait le nouveau cap numérique.
Début 2017, le "digital first" devenait réalité avec près de 20.000 abonnés numériques.
Olivier Gerolami, président du directoire de GSO depuis janvier 2012, affirmait alors : " Il faut passer de la culture lecteurs à la culture clients ". Objectif 2020 : 50.000 abonnés numériques...
En janvier 2019, un comité exécutif de GSO annonce le départ du président du directoire Olivier Gerolami. Il est remplacé en mai par Patrick Venries qui a été rédacteur en chef dans les années 2000.
Le projet de réorganisation de la rédaction est relancé au moment où GSO annonce que toutes ses entités ont dégagé un résultat d'exploitation positif (Sud Ouest, Charente Libre, Pyrénées Presse, Dordogne Libres, les éditions Sud Ouest, S2D, Terre de Vins, TV7, l'agence événementielle Cote Ouest et les hebdos locaux).
SO est confronté à une baisse régulière de sa diffusion (6 à 7 % chaque année) et les autres quotidiens du groupe sont impactés : les plus fortes baisses des autres quotidiens du groupe concernent La Charente Libre (29.127 ex.) et L'Eclair des Pyrénées (6.095 ex.) qui ont chuté respectivement de 4,04 % et 4,36 %.
Fin 2018, GSO a mis un terme au partenariat qui existait avec le groupe Bolloré pour la diffusion du quotidien gratuit CNews Bordeaux 7.
Trois hebdos locaux ont été vendus : Le Journal du Médoc et la Haute Saintonge, en 2016, et L'Hebdo de Charente-Maritime, cédé en 2013.

Lire aussi : En difficulté économique, le journal Sud-Ouest va supprimer 132 postes (France Bleu, 10/07/2019)

Nice-Matin, Var-Matin, Monaco-Matin, a failli être repris en 2014 à Hersant Media (GHM) par le fonds GXP Capital mais l'argent n'est jamais arrivé !
Finalement, le journal fondé à la Libération, cédé au groupe Hachette en 1998, puis à GHM en 2007 pour 160 M€, est devenu une SCIC (société coopérative d'intérêt collectif) au 1er décembre 2014.
A l'issue d'un redressement judiciaire, le tribunal de commerce de Nice avait préféré le projet de la SCIC au projet de Priminvest Médias, du milliardaire franco-libanais Iskandar Safa, déjà propriétaire du groupe Valmonde (l'hebdo Valeurs Actuelles), associé au groupe belge Rossel,  et au groupe de BTP monégasque Marzocco.
159 départs volontaires (15 % des effectifs) avaient suivi le lancement de la coopérative.
Sa création reposait sur l'apport de 14,2 M€ (2,3 venant du personnel, 460.000 € de dons, 2 venant de prêt du conseil régional, 1,5 apportés par des mouvements de coopérative, 8 issus de cessions de Bernard Tapie).
En 2016, le groupe belge Nethys, entrait au capital (20 %) via sa filiale Avenir Développement.  Un pacte d'actionnaires prévoyait d'accroître sa participation.
Avec 2 M€ de pertes en 2017, Nice Matin est passé par un plan social qui l'avait allégé de 80 postes (soit 10 % de l'effectif actuel de 800 personnes dont 180 journalistes).
Fin 2017, Nethys passait à 34 % en injectant 1,4 M€ et devait devenir majoritaire à 51 % en décembre 2018, avec 1,6 M€ supplémentaires.
Coup de théâtre, Nethys décidait alors de revendre ses parts accédant à la demande du gouvernement wallon de se désengager de ses actifs à l'étranger.
Fin janvier 2018, une seule offre de reprise, étudié par Nethys, a été officialisée par le groupe Priminvest Médias, déjà candidat en 2014, pour la reprise des 34 % de participation moyennant une offre à 40 M€.
Priminvest Médias est une filiale du groupe de construction navale niçois Priminvest.
Une offre d'achat des 66 % des parts de la SCIC, devait être présentée par le futur actionnaire, à la date butoir du 28 février 2019.
Faute d'avoir reçu cette offre finalisée, la SCIC a demandé au tribunal de commerce l'ouverture d'une procédure de sauvegarde.
Le 6 mars 2019, le tribunal a donné satisfaction à la SCIC mais l'actionnaire belge la conteste et engage un recours.
La décision du tribunal permet néanmoins la reprise du quotidien par Priminvest Médias.

Nouveau coup de théâtre en juin 2019 avec l'offre exclusive annoncée par Xavier Niel, actionnaire du Monde, qui vient supplanter l'offre du franco-libanais Iskandar Safa. Une information annoncée par le quotidien belge La Meuse.
Selon Mediapart Xavier Niel aurait aussi fait l'acquisition des 11 % de Nethys dans La Provence pour revendre cette participation au milliardaire, également franco-libanais, Rodolphe Saadé, PDG du géant du transport-maritime CMA-CGM, le but de Niel étant, grâce à cette revente de mettre la main sur les actifs de télécommunication du groupe belge.
Dernier épisode, Iskandar Safa tente de faire échouer la tentative de Niel.

Lire : L'épreuve de force se poursuit pour le contrôle de Nice Matin (Le Monde 4/07/2019)
Rachat de Nice-Matin : Niel grille la priorité au droitier Safa (Libération 24/06/2019)

La stratégie numérique de Nice Matin, lancée fin 2015, prône le "journalisme de solutions".
Un projet de 1 M€ financé à 60 % par le décrié fonds Google Digital News Initiative pour l'innovation numérique et une campagne de financement participatif.
Benoît Raphaël, expert en transformation digitale, a accompagné ce tournant décisif en constituant une équipe dédiée, chargé d'analyser les datas.
Nice Matin et Var Matin diffusent respectivement 70.989 ex. (- 5,4 %) et 50.260 ex. (- 4,85 %).
Des informations contradictoires laissent entendre que le promoteur Quartus aurait des vues sur le site de l'ancienne rotative qui pourrait devenir une salle de congrès.


La Provence, propriété de Bernard Tapie (89 %) et du belge Nethys (11 % depuis fin 2015) a retrouvé le chemin de la rentabilité en 2016 mais sa diffusion, passée sous la barre des 100.000 n'est plus que de 96.338 ex. (- 2,45 %).
Ce journal a été lancé en 1997, de la fusion du Méridional (quotidien de droite racheté en 1971 par Gaston Defferre) et du Provençal (quotidien de gauche, acquis à la Libération), sous la houlette du groupe Hachette (Lagardère) qui rachètera un an plus tard Nice Matin, le quotidien marseillais passa sous les couleurs du groupe Hersant Médias en 2008.
Fin 2012, une augmentation de capital  permet l'entrée du groupe Nethys et de Bernard Tapie mais en juillet 2013, Philippe Hersant cède le journal à l'ancien président de l'OM.
Fin 2017, Tapie qui avait racheté 50 % des parts de Corse Matin que détenait Nice Matin (depuis 1999) en cédait le tiers (35 %) à l'armateur CM Holding. Cet actionnaire minoritaire, qui possède notamment la compagnie Corsica Linea, a obtenu la restructuration du quotidien qui engage un plan de départs au printemps 2019.

Côté numérique, le groupe a acheté début 2018 le pure player Lephoceen.fr spécialisé dans l'actualité de l'OM. Il revendique 1,5 millions de visiteurs uniques par mois.
Le 18 janvier 2019, les sociétés de Bernard Tapie ont été mises en redressement judiciaire, énième épisode du feuilleton débuté en 2008 par l'arbitrage de 404 M€ qui lui avait été accordé dans le cadre du litige qui l'opposait au Crédit Lyonnais dans la revente d'Adidas en 1994.


Paris Normandie sauvé du redressement judiciaire en 2017 par l'industriel Jean-Louis Louvel (leader français de la palette en bois), entré dans le capital à hauteur de 49 %, a recruté cet automne le "digital addict" Valéry Jimonet au poste de DGA.
Sa citation préférée de Darwin est : " Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s'adaptent le mieux aux changements ".
En 2014, Michel Lépinay, directeur de PN de 2004 à 2012, analysait l'échec de la
profession : " La PQR a mis tout son contenu gratuitement en ligne car elle ne croyait pas à Internet ".
Le quotidien rouennais accusait en 2017-2018 une baisse dangereuse de sa diffusion : 48.212 exemplaires - 5,61 %. Pour 2018, la situation s'est encore dégradée : 44.340 exemplaires - 11,87 %

Le Parisien avec ses 10 éditions départementales (Ile-de-France, Oise) est intégré à la PQR, Aujourd'hui en France étant l'édition nationale.
Propriété du groupe LVMH depuis 2015, sa stratégie numérique est devenue une priorité sur le papier depuis le printemps 2015.
Après un premier objectif atteint (la conquête de 25.000 nouveaux abonnés, jeunes, en deux ans), le PDG Pierre Louette, ex-numéro 2 d'Orange, ancien PDG de l'AFP, nommé en mars 2018 à la tête du groupe Les Echos-Le Parisien, a pour mission d'accélérer la transition numérique. Il a annoncé fin janvier 2019 que le nouvel objectif était d'atteindre 300.000 abonnés numériques et print d'ici cinq ans.
Un objectif fixé depuis que les ventes s'érodent (- 8,18 % en 2014). L'érosion persiste encore même si elle a été freinée. La diffusion 2017-2018 est passée sous la barre des 200.000 exemplaires à 198.328 ( - 4,15 %), l'édition nationale ne pesant que 113.787 ex. (- 10,62 %).

En août, Le Parisien a lancé sa nouvelle appli mobile qui permet un accès illimité et sans publicité à tous les contenus de la rédaction. LeParisien.fr qui doit lancer une nouvelle version au premier semestre 2019 sera liée à un nouveau logiciel (en place au Washington Post) qui facilite le chargement des pages Web.
LVMH a déjà l'expérience réussie du développement digital de Les Echos qui va encore améliorer son site. 42.700 abonnés numériques sont déjà revendiqués.
Le groupe est également actionnaire du pure player Slate.fr à hauteur de 1,5 % via sa filiale Ufinvest, le principal actionnaire étant le baron Benjamin de Rothschild (46,2 %). Ufinvest a également apporté 6 M€ pour la création du quotidien libéral L'Opinion qui propose une version papier et une offre numérique payante. (diffusion déclarée entre 25.000 et 30.000 ex./jour, non vérifiable car le journal n'adhère pas à l'ACPM).
Début novembre, le groupe Lagardère a annoncé être entré en négociations exclusives avec Le Parisien-Les Echos pour lui céder son pure player Boursier.com. En septembre, était annoncé une entrée au capital de Binge Audio, grand réseau français numérique de podcasts.
Début 2019, LVMH a renfloué les pertes du Parisien à hauteur de 400 millions d'euros.



La Marseillaise, dernier vestige du pluralisme en PACA, annonçait début 2018 un plan amputant la moitié de ses effectifs (44 emplois sur 85). Pour le quotidien affilié au parti communiste, aucun objectif numérique mais une opération survie !
Après 18 mois de redressement judiciaire, la moitié de sa dette (7 M€) a été épongée et de nouveaux actionnaires sont arrivés. Médias & Publicité apporte 1 M€ et le promoteur Quartus (filiale de Natixis - groupe Banque Populaire Caisse d'Epargne) a mis 300.000 € sur la table pour 33 % du capital. Il deviendra propriétaire du siège du journal en 2024 en payant le crédit-bail de 2,5 M€ octroyé par la Caisse d'Epargne en 2012.
Objectif : transformer un super emplacement de 3.500 m2 dans le quartier du Vieux-Port pour installer des bureaux.
Avec un tirage tombé à 15.000 exemplaires, La Marseillaise a dû supprimer cinq éditions pour alléger ses charges...


L'écho du Centre, quotidien (créé en 1943) diffusé dans cinq départements (Indre, Dordogne, Corrèze, Haute-Vienne, Creuse) est issu de la résistance.
Proche du PCF il s'en est éloigné pour devenir indépendant à la fin des années 1980. Depuis 1998, 62 % des actions de la société d'édition appartiennent à l'association "Pluralisme" qui réunit lecteurs et partisans de la liberté de la presse.
Le reste est assuré par Le Monde (10 %), les groupes concurrents Centre France et Sud-Ouest (5 % chacun) et des investisseurs régionaux.
Ce montage n'a pas suffit à empêcher les difficultés de gestion. Après un premier redressement judiciaire en 1994, un second intervient fin 2012.
En 2017 et 2016, le journal reste déficitaire et ne diffuse qu'à 26.853 exemplaires (d'après l'UPREG). Il dispose d'un site internet mais les contenus sont identiques aux éditions papier.

ANALYSE

Le rythme s'accélère et la profession doit s'adapter.
Des métiers ont disparu : clavistes, correcteurs, metteurs en pages, monteurs, photograveurs, ont été remplacés par des programmes informatiques. Quant aux rotativistes, dernier bastion du syndicat du Livre (FILPAC CGT), ils sont progressivement engloutis au gré de la concentration des imprimeries. Le XXIe siècle balaie les vestiges de la Révolution industrielle...

A l'occasion du "black friday" de novembre 2018,
le quotidien régional La Dépêche casse
 le tarif de son abonnement digital
Quel modèle économique demain ?

La croissance des portefeuilles d'abonnés numériques reste encore faible en dépit des offres "freemium" qui se développent après d'inconscientes années de gratuité.
La chasse aux "clics" est lancée avec le "web first" où la même info d'abord gratuite devient payante sans valeur ajoutée !
Le nouveau modèle économique n'est pas encore pour demain car le chiffre d'affaires généré ne suffira pas à compenser les pertes abyssales des recettes publicitaires du print (- 5 % pour la PQR selon le baromètre Bump au 1er trimestre 2018, alors que les médias numériques progressent de + 15 %). Un lecteur numérique ne rapporte qu'entre 1 et 3 € par an contre 20 à 60 € pour un lecteur papier...
Seules ripostes, les alliances conclues par une centaine d'éditeurs pour que les annonceurs puissent acheter la publicité sur l'ensemble des supports, via Gravity, Le Monde et Le Figaro ayant créé Skyline pour une mise en commun numérique de la publicité...
Pendant ce temps, il faut continuer d'amortir des rotatives aux tirages de plus en plus faibles, modernisées à prix d'or pour le "tout couleur", investir dans les algorithmes du "data", innover dans le marketing (notamment les outils d'analyse des données des "lecteurs" numériques, comme la plateforme Chartbeat qui permet aux médias de réagir en temps réel aux vagues virales), investir dans la diversification événementielle, et ne pas oublier de provisionner les plans sociaux !

L'info en temps réel a anéanti la notion de bouclage, rendant obsolète l'édition papier dépassée avant même sa mise en vente ou sa livraison chez l'abonné.
Le quotidien du matin n'est plus que le journal de la veille !
La forte valeur de l'attachement territorial fourni par l'info locale ne suffit plus pour attirer le lecteur qui réclame de l'investigation, de l'exclusivité, du décryptage, la chasse au "fake news", du service à la personne rendu possible grâce à la géolocalisation.

Quels journalistes demain ? 

Depuis quelques années, les journalistes sont "plurimédias". Polyvalents, ils maîtrisent l'écriture Web, jonglent sur les réseaux sociaux en seulement 140 signes (Twitter), savent poser leur voix devant un micro, lire un prompteur ou monter une vidéo ! Le métier s'est précarisé. Davantage de CDD, moins de CDI, et l'on voit de plus en plus de piges sous le statut d'auto entrepreneur, en violation flagrante de la loi Cressard. Les "partenariats" se multiplient sous la houlette des services marketing et promotion, bousculant les règles déontologiques (voir le cas du Progrès de Lyon avec l'OL)...
Et demain ? Que feront les journalistes ?
Les restructurations se multipliant, les ressources humaines seront de plus en plus réduites...
Des robots prennent déjà la place des journalistes  pour des tâches basiques comme la météo ou des résultats sportifs ! Une réalité en Suède dans le groupe MittMedia ou dans la presse américaine... 
Associated Press, Reuters.
En France, l'AFP produit déjà des dépêches rédigées par des algorithmes. La vidéo automatisée commence à susciter l'intérêt des grands groupes et d'investisseurs. Prisma Media, Le Parisien, Le Figaro, LCI sont clients de la plate-forme Wibbitz et Radio France (France Culture, France Musique, RFI) fait appel à la start-up Wochit pour créer des petites vidéos en ligne sans intervention de journalistes.
LabSense (groupe Pratique) produit des contenus automatisés pour des filiales de TF1.
Syllabs a Ouest-France parmi ses actionnaires.

Lire aussi : Robot-Journalisme : entre acceptation et inquiétude (CB News du 10.03.2019)
Comment l'intelligence artificielle a transformé la presse américaine (Les Echos du 19.01.2019)


La domination des GAFA

En France, les GAFA - du nom des quatre grands Google, Amazon, Facebook, Apple - vont être taxés à hauteur de 3 % de leur chiffre d'affaires, ce qui devrait rapporter 500 M€ par an.
Le projet de taxation a été présenté en conseil des ministres le 6 mars 2019.
Cette riposte franco-française résulte de l'impossible accord qui aurait dû être trouvé au niveau européen. Une taxe très minimaliste qui touche une trentaine de groupes, majoritairement américains, mais aussi chinois, allemands, espagnols et britanniques.
La révolte des "Gilets Jaunes" avait poussé le ministre de l'Economie à promettre leur taxation dès 2019 par la France (comme c'est le cas en Espagne depuis fin 2014)...
En attendant, les GAFA siphonnent les recettes publicitaires de la presse écrite en captant 78 % de la publicité numérique

Quant au projet de réforme européenne du droit d'auteur validé en septembre dernier, et voté fin mars 2019, il devrait les contraindre à contribuer à la rémunération de la reproduction des articles partagésUne aumône évidemment contestée par les géants du Net...

La résistance numérique des médias ne fait que commencer !

Thierry Noël


Lire aussi :  Au moins 108 agences locales de PQR ont fermé en 10 ans (Médiacités 26/06/2019) 
Presse locale : la grande hémorragie (Médiacités 26/06/2019)
Concentration, diversification & numérique : la PQR cherche à se réinventer (INA, la revue des médias 14.1.2019)
> Pour en savoir plus : ARTE, Vers un monde sans papier (dossier de presse et vidéo Youtube)




Tous les chiffres de diffusion cités proviennent du tableau de l'Acpm (Alliance pour les chiffres de la presse et des médias)




Cette infographie de 2013 permet de mesurer l'évolution négative de la PQR en seulement cinq ans.
Parmi les baisses les plus significatives : Ouest-France tombé à 659.681 exemplaires en 2017-2018. Sud-Ouest 234.752 ex. La Voix du Nord 204.041 ex. Le Parisien 198.328 ex. Le Dauphiné 193.856 ex. 
Le Télégramme 190.475 ex. Le Progrès 169.524 ex. La Montagne 154.568 ex. 
La Nouvelle République 151.705 ex. DNA 138.686 ex.
La Dépêche 135.477 ex. L'Est républicain 115.846 ex. Midi Libre 98.960 ex.
La Provence 96.338 ex. Nice Matin 70.989 ex.
CLASSEMENT DES GROUPES : EBRA 920.082 - Ouest France - Journaux de Loire 830.345 - 
Rossel 377.704 - La Dépêche 310.535 - Sud-Ouest 297.750 - Le Parisien 198.328 - Télégramme 190.475 - 
NRCO Centre-Presse 162.074 - La Provence Corse Matin 128.448 - Nice Matin Var Matin 121.249 -
Paris Normandie 48.212.



Pour la diffusion 2018 des quotidiens nationaux : voir le tableau de l'ACPM

Voir aussi les classements qui montrent que la PQR a beaucoup de progrès à faire :
- les applis (1er L'Equipe, 4e Le Monde, 6e Le Figaro, 10e Le Parisien, 13e Ouest France)
- les sites :
2e LeFigaro.fr
4e LeMonde.fr
8e 20minutes.fr
9e Ouest-France.fr
10e LeParisien.fr
19e LesEchos.fr
21e Actu.fr
29e Liberation.fr
30e Ledauphine.com
32e Sudouest.fr
33e Ladepeche.fr
35e Leprogres.fr
38e Lavoixdunord.fr
48e Laprovence.com
49e Midilibre.fr
53e Estrepublicain.fr
62e Nicematin.com
63e Letelegramme.fr
67e Republicain-lorrain.fr
69e Varmatin.com
70e Lamontagne.fr









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