dimanche 7 août 2022

GUERRE EN UKRAINE

HUIT JOURNALISTES TUÉS DEPUIS LE DÉBUT DE LA GUERRE 


30 mai 2022 : Frédéric Leclerc-Imhoff, 32 ans, journaliste reporter d'images pour BFM TV depuis six ans, a été tué par un éclat d'obus à bord d'un camion blindé accompagnant un convoi humanitaire, lors d'une attaque russe sur la route de Sievierodonetsk, dans la région de Louhansk (est de l'Ukraine).

Diplômé de l’IJBA (2014), il a également réalisé des reportages pour l’agence Capa.

C’était sa deuxième mission en Ukraine.

Frédéric Leclerc-Imhoff est le 8e journaliste tué depuis l’invasion russe le 24 février dernier.

Le parquet national antiterroriste a ouvert une enquête pour crimes de guerre.

Son confrère Maxime Brandstaetter (ESJ Paris Grand Lille 2018), qui l’accompagnait, a été légèrement blessé à la jambe (il a travaillé à RMC, Canal, GrandLille TV, CNews, La Nouvelle République, TV Tours, Radio Campus). 

Oksana Leuta, leur fixeuse ukrainienne, professeur de russe au lycée français de Kiev, est indemne. 


Les premiers journalistes ukrainiens tués l’ont été le 1er mars :  Evgueni Sakoun, dans le bombardement de la tour de télévision à Kiev, et Viktor Doudar, pendant des combats près de Mykolaïv, au sud. 

L’américain Brent Renaud, 50 ans, a été le premier reporter étranger tué par balle le 13 mars, dans la banlieue nord-ouest de Kiev. Un de ses confrères qui l’accompagnait, Juan  Arredondo a été blessé.

Ancien reporter du New York Times, devenu journaliste indépendant, il effectuait un reportage sur les réfugiés. Avec son frère, également journaliste, il avait couvert les guerres d’Irak et d’Afghanistan.  


Le 14 mars, Pierre Zakrzewski, 55 ans, perdait la vie dans sa mission d’information. Né d’une mère française et d’un père polonais, cameraman franco-irlandais de la chaîne américaine Fox News, il a été la cible de tirs à Horenka, près de Kiev. Il accompagnait le journaliste anglais Benjamin Hall blessé aux jambes par des éclats d’obus. Leur "fixeuse", Oleksandra Kuvshinova, journaliste de 24 ans, a aussi été tuée.

Le 23 mars, la correspondante russe indépendante Oksana Baulina, 42 ans, du média en ligne The Insider était tuée dans le nord de la capitale ukrainienne dans l’explosion d’une roquette.


Le 1er avril, après le retrait de troupes russes, le corps sans vie du photographe-documentariste ukrainien Maks Levin, 40 ans, a été retrouvé, trois semaines après qu'il n'ai plus donné signe de vie, près du village de Gouta Mejyguirska, à une dizaine de kilomètres au nord de Kiev. Il n'était pas armé et portait une veste signée « presse ».


Le 2 avril, le réalisateur lituanien Mantas Kvedaravicius, 45 ans, a été tué par l'armée russe alors qu'il tentait de quitter Marioupol, où il réalisait un documentaire. Fait prisonnier, il a été abattu d'une balle dans la tête et d'une autre dans la poitrine, a précisé Lyudmyla Denisov, défenseur des droits ukrainienne. Son corps sera retrouvé cinq jours plus tard avec des marques de brulures et les deux jambes brisées.


Le 28 avril, Vira Ghyrytch, 55 ans, journaliste ukrainienne depuis 2018 à Radio Free Europe/Radio Liberty, financée par les États-Unis, a été tuée dans un bombardement mené sur Kiev par les Russes, le jour de la visite du secrétaire général des Nations Unies. Elle a été retrouvée dans les décombres de son immeuble de 25 étages. Au début des années 2000, elle était porte-parole de l’ambassade d’Israël en Ukraine.


Le 4 mai, Oleksandr Makhov, 36 ans, reporter ukrainien pour sa couverture du conflit dans le Donbass, a été tué par les troupes russes dans la région de Kharkiv. Il s’était rendu célèbre pour avoir demandé sa compagne en mariage sur la ligne de front.



NOVAÏA GAZETA SUSPEND SA PUBLICATION


28 mars 2022 : Novaïa Gazeta, dernier journal indépendant de Russie, dirigé par Dmitri Mouratov, prix Nobel de la Paix 2021, annonce qu’il reprendra ses publications « à la fin de l’opération militaire spéciale en Ukraine ». 

Depuis le début du conflit, le trihebdomadaire, était conçu « dans le respect des règles du nouveau code pénal », en ligne et sur papier. 

Une « Une » récente montrait le quadrille du Lac des cygnes de Tchaïkovski, sur fond d’embrasement. Une image qui renvoie à la télévision de l’époque soviétique qui diffusait des ballets quand elle ne pouvait pas traiter l’actualité…

La décision prise fait suite à un second avertissement en moins d’une semaine pour manquement à la loi sur les « agents de l’étranger ». Citée, une ONG n’avait pas été mentionnée avec ce statut.

Novaïa Gazeta était le journal d’Anna Politkovskaïa, journaliste assassinée en 2006.



MARINA OVSYANNIKOVA A RÉUSSI À FUIR LA RUSSIE


17 octobre 2022 : l’avocat de la journaliste russe de 44 ans Marina Ovsyannikova a annoncé qu’elle avait réussi à fuir la Russie début octobre. Assignée à résidence, elle avait été interpellée en août, mise en examen et placée en détention provisoire (photo ci-contre, capture d’écran PK).

Le 14 mars, sur la première chaîne russe Pervi Kanal, elle s’était placée derrière la présentatrice du programme Vremia (Le Temps) à une heure de grande écoute en brandissant une pancarte « Non à la guerre »

Elle risquait dix ans de prison pour diffusion de « fausses informations ». Arrêtée à 6 h du matin à son domicile de Moscou, les enquêteurs lui reprochaient d’avoir manifesté devant le Kremlin le 15 juillet. 

Libérée en mars après plus de 14 h d’interrogatoire, un tribunal lui avait infligé une simple amende de 30.000 roubles (250 €) pour « infraction administrative ». 

Le 28 juillet, un tribunal de Moscou la condamnait à une amende de 50.000 roubles (800 €) pour « discréditation des forces armées russes »..

Dans une vidéo postée peu avant son coup d’éclat, elle expliquait que son père est ukrainien et sa mère russe. Elle demandait pardon d’avoir participé à la propagande de Poutine et appelait à la mobilisation contre la guerre.

Née à Odessa, sortie en 2005 de l’académie russe de la fonction publique et de l’économie,  cette ancienne championne de natation de 43 ans a deux enfants de 11 et 17 ans. 

Cachée par des amis après son coup d’éclat à la télévision, elle donna une interview au magazine allemand Der Spiegel, indiquante ne pas vouloir quitter son pays, et déclinant l’offre d’asile proposée par la France. Le quotidien allemand Die Welt avait embauché pour trois mois la journaliste comme correspondante en Ukraine et en Russie.


ELENA VOLOCHINE : UNE DICTATURE DE GUERRE


8 mars 2022 : Elena Volochine, journaliste franco-russe correspondante depuis une dizaine d’années de France 24, a décidé de rentrer à Paris. 

« Pour la première fois j’ai senti que je n’allais plus pouvoir faire mon travail. Et qu’il était temps de partir », a-t-elle précisé. « Des règles du jeu étaient établies depuis que je travaille. Mais ces règles ont changé basculant vers une dictature de guerre ».

En 2019, elle réalisa le documentaire « Le choix d’Oleg », consacré aux soldats de la guerre du Donbass, avec James Keogh, photo-reporter de guerre franco-irlandais.


REPORTERS SANS FRONTIÈRES


Dès le début du conflit, RSF a ouvert à Lviv, à la frontière polonaise, un centre pour la liberté de la presse en Ukraine. Il permet aux équipes de travailler, de leur fournir du matériel de protection (casques et gilets par-balles) et une assistance financière et psychologique. Contre la censure en Russie des sites d’information indépendants, RSF a débloqué Meduza.io, le média russe le plus populaire du pays (qui revendique plus de 13 millions de visiteurs uniques par mois). 

Le 15 avril, le site web de RFI, bloqué par le régulateur russe des télécoms, a été remis en ligne par RSF. Ces actions sont engagées dans le cadre de l’ opération Collateral Freedom, avec le soutien technique de hackers, informaticiens et ingénieurs dans plusieurs pays d’Europe. 

RSF rappelle que la Russie occupe la 150e place sur 180 pays au classement mondial de la liberté de la presse 2021.


EN RETRAIT DE RUSSIA TODAY


En raison de la guerre en Ukraine, des chroniqueurs français ont décidé de se mettre en retrait de la chaîne Russia Today (RT) qui émet en France depuis 2017.

Frédérique Taddeï animait depuis 2018 le talk-show « Interdit d’interdire » : « La situation internationale étant ce qu’elle est, j’ai décidé ce matin d’arrêter d’animer Interdit d’Interdire. Par loyauté envers la France, je ne peux pas continuer une émission de débat contradictoire à partir du moment où mon pays se retrouve en conflit ouvert avec la Russie » a annoncé le 24 février le journaliste, ex-présentateur de «D’art d’art».

Né en 1961, animateur de débats culturels sur France 3 puis France 2 (« Ce soir ou jamais » de 2006 à 2016), il a présenté de 2018 à 2020 une émission d’entretiens sur Europe 1.

Stéphanie de Muru, visage de RT depuis 5 ans, annonce le 1er mars sa décision de quitter le média russe. La journaliste a déclaré que « l’intervention militaire russe était pour moi la ligne rouge ». Entre 2005 et 2017, elle exerçait sur BFM TV.

Alain Juillet, haut fonctionnaire qui a exercé à la DGSE, avait rejoint RT en février 2020 où il animait deux fois par mois la chronique géopolitique « La source ». Il a cessé sa collaboration le 11 janvier 2022.



MÉDIAS CENSURÉS PAR LA RUSSIE


Depuis le début du conflit, les autorités russes interdisent aux médias d’utiliser les mots « guerre » et « invasion », et d’utiliser des informations autres que les déclarations officielles.

De nombreux médias internationaux ont décidé de suspendre leur mission en Russie compte tenu de la censure et des mesures de répression : la BBC, les chaînes publiques allemandes et italiennes ARD, ZDF et la RAI.

Dès le 24 février, Roskomnadzor, l’organisme russe de surveillance des médias a bloqué le site de Nastoyashchee Vremya (Temps présents), une filiale de Radio Free Europe / Radio Liberty. L’animateur de télévision Ivan Ourgant a été écarté et la journaliste Elena Tchernenko exclue d’un groupe de journalistes accrédités par le gouvernement parce qu’elle a rédigé une lettre anti-guerre.

Plusieurs médias ont été censurés : les éditions russophones de la BBC, la télévision Deutsche Welle, les sites indépendants Meduza et radio Svoboda.

En Russie, la station Ekho Moskvy (Écho de Moscou) a été contrainte le 3 mars de se saborder et la chaîne indépendante Dojd suspend son activité.

Le site Mediazona, une des dernières voix indépendantes en Russie, a été bloqué en raison de sa couverture de l’invasion en Ukraine, tout comme le site d’investigation Bellingcat connu pour ses enquêtes sur la guerre du Donbass ou l’empoisonnement d’opposants.

Depuis le 21 mars, le site d’Euronews, la télévision paneuropéenne, et sa version russe ru.euronews.com sont bloqués.

En France, Sputnik News, agence de presse russe, a été placée en liquidation judiciaire début mai 2022, suite aux sanctions de l’Union européenne.





PRESSE QUOTIDIENNE RÉGIONALE

SOS PQR !


2 décembre : depuis la pandémie du Covid, la presse locale survit ! 

Inexorablement la tendance s’installe : au fil des mois, la presse quotidienne régionale (PQR) - certifiée par l’Alliance pour les chiffres dans la presse et les médias (ACPM) - enregistre des baisses inquiétantes de diffusion dans un contexte globalement négatif pour la presse écrite ( - 4,6 % en 2023). 

Un constat inquiétant pour la PQR dont la plupart des titres célèbrent en 2024 leurs 80 ans. Ils représentent 37 % de la diffusion totale, suivie par les magazines 36 %, la presse quotidienne nationale 17 %, la presse du 7e jour 5 %, la PHR (presse hebdomadaire régionale) 2 % et la presse professionnelle 1 %.


> Une dizaine de titres sont fortement impactés 

  • Corse Matin  - 8,8 %  Le Courrier Picard - 8,65 % Sud Ouest - 8 %
  • La Provence - 7,93 %  Paris Normandie - 7,6 % La Dépêche du Midi - 7,24 %   
  • La Voix du Nord - 7,14 % Presse-Océan - 6,96 %  
  • L’Aisne nouvelle - 6,07 %  L’Yonne républicaine - 6,02 % 

> Plusieurs titres de la PHR affichent des pertes supérieures à 10 % de leur diffusion :

La République de Seine-et-Marne - 11,23 % Le Réveil de Neufchâtel - 10,48 % Le Perche - 15,45 % L’Éclaireur Châteaubriant - 13,84 % L’Indépendant du Pas-de-Calais - 11,6 % Oise Hebdo - 10,26 %


EBRA : comment sortir du rouge

7 novembre : 17 M€ de déficit en 2023, des prévisions qui ne s’annoncent guère meilleures pour 2024… Ce bilan alarmant a été révélé par Philippe Carli, PDG de Groupe EBRA (*), lors de la réunion du comité de groupe tenue à Paris :  « Nous ne pouvons pas continuer à ce rythme avec des ventes de journaux en chute de 8 % par an. Sinon en 2027 nous allons terminer dans une situation que nous n’avons pas du tout envie de connaître ». La baisse de la diffusion est la cause n°1 de ces résultats qui laissent augurer une situation délicate en dépit de plusieurs recapitalisations du Crédit Mutuel, actionnaire à 100 % depuis 2009. 

Malgré 10 % de croissance, le digital est loin de compenser les pertes alors que la vente des journaux représente encore 90 % du chiffre d’affaires.

Révision du plan stratégique 2024-2027 d’ici mars

EBRA se donne 24 mois pour revenir à l’équilibre financier en 2027. Pour Philippe Carli « la chute continue des revenus historiques d’Ebra impose des changements structurels pour assurer la pérennité du groupe ». Il préconise « la mise en œuvre rapide » de la révision du plan stratégique 2024-2027 : les remèdes préconisés sont la mutualisation, un plan de transformation des métiers et un programme d’économies. Une présentation plus précise de ce plan est prévue en mars 2025.


(*) EBRA compte neuf titres régionaux : Les Dernières Nouvelles d’Alsace (DNA), L’Est républicain, L’Alsace, Le Républicain lorrain, Vosges Matin, Le Dauphiné libéré, Le Progrès, Le Bien public, Le Journal de Saône-et-Loire.


Pour mémoire, en octobre dernier, des tensions étaient apparues lors de la mise en place de la charte de bonne conduite sur l’utilisation de l’intelligence artificielle, la direction ayant décidé de recourir à ChatGPT pour la réécriture des dépêches AFP. Une première expérience avait été lancée dans une locale de L’Est républicain pour le traitement de la copie des correspondants locaux. Le bilan était mitigé.

ANALYSE

Un modèle économique en panne


Contrairement à la PQN, qui a su très tôt entamer sa transformation numérique, la PQR est en retard et le « digital first » ne compense pas les pertes du « print » dans un paysage où les charges augmentent (papier, énergie, contraintes environnementales). 

Les raisons sont structurelles : une population vieillissante qui reste attachée au papier, la disparition progressive des lieux de vente dans les villes, une démographie chancelante dans les secteurs ruraux désertifiés.

Le modèle économique de la presse ne fonctionne plus.

Basé sur le triptyque - diffusion, publicité, diversification -  il a atteint ses limites : depuis 2006, les recettes publicitaires de la presse papier ont été divisées par trois, siphonnées par les plateformes numériques. Le coup de grâce a été donné par les confinements de 2020 et 2021 durant la pandémie du Covid.

Les coûts de production (papier, énergie, inflation) ont augmenté et tous les titres ont dû relever leur prix au risque d’atteindre un seuil psychologique dans un lectorat qui ne considère plus le journal comme « indispensable ». 

Pour économiser le papier, des éditions ont été supprimées et le format des journaux  réduit. Les rotatives modernisées à grands frais avec l’aide de l’État ces dernières décennies, voient les tirages baisser, entraînant un amortissement plus lourd.


> Une course de fond pour redresser la barre


Les groupes de presse ne sont pas restés inactifs pour enrayer la situation :

  • accélération du virage digital (la diffusion numérique a progressé de 16,8 % en 2023)
  • stratégies rédactionnelles offensives, nouveaux canaux de diffusion via les réseaux sociaux, synergies avec les filiales radio-télé
  • mutualisation, fermetures d’agences locales, recapitalisations, cessions


Lorsque les chiffres comptables s’affolent, des plans sociaux sont engagés. 

Sur 51 titres de PQR, une douzaine ont annoncé des « plans » en 2023 et 2024 : « stratégiques » ou de « modernisation » - de doux euphémismes pour ne pas dire PSE - avec priorité donnée aux départs volontaires pour alléger la masse salariale, sans oublier de budgéter les clauses de cession (70 à La Provence).

En 2024 :


EBRA : lourd déficit (lire plus haut)

Sud Ouest : PSE en mars (118 postes supprimés, dont 25 à la rédaction)

Centre France : 70 départs volontaires

La Dépêche du Midi : remise en cause des accords d’entreprise 


Début novembre, La Tribune Républicaine de Bellegarde (hebdo du groupe Messager Rossel-La Voix) cesse de paraître après 125 ans.

Fanny de Larue, directrice du titre explique sa décision : «  Depuis plusieurs années, le titre n’est plus rentable. On a mutualisé toutes les charges possibles pour préserver le titre (…) moins de 10 % des abonnés sont 100 % numériques (…) on a fait croire aux gens que l’information était gratuite »

Les Nouvelles Calédoniennes : liquidation judiciaire

Le Quotidien de la Réunion : liquidation judiciaire et reprise par Media Capital Réunion

Le Journal de l’Île de la Réunion (JIR) et le site clicanoo.re : liquidation fin juillet. 80 salariés au chômage

20 Minutes (journal gratuit de Rossel-SIPA Ouest-France) : suppression de l’édition papier en septembre et suppression de 56 postes.

En 2023 :

La Voix du Nord : 105 emplois supprimés dont 48 journalistes, 50 postes créés. Réduction des éditions  de 17 à 13 (purge à  Calais, Lille, Roubaix-Tourcoing). Une réplique du plan de 2017 (132 départs volontaires).

Le Dauphiné Libéré : 20 départs volontaires, 9 postes supprimés à Vaucluse Matin

Progrès, Journal de Saône-et-Loire, Bien Public : 12 postes supprimés (9 journalistes) 

La Provence : 30 postes supprimés

Midi Libre : départs volontaires (45 salariés dont 26 journalistes) fin 2022

La Nouvelle République : 107 postes supprimés depuis 2018 (32 journalistes)

> Quelles perspectives d’avenir ?

Les difficultés de la PQR n’empêchent pas les initiatives pour développer le lectorat, diversifier les ressources financières, innover. Quelques exemples récents :

Groupe Télégramme : prise de participations dans la société d’audiovisuel Link AM pour renforcer les capacités de production vidéo du quotidien. Elle a été fondée en 2014 à Saint-Etienne (Loire). Avec ses trois sociétés Teaser Médias, Agence Méthode et Plein Axe, elle produit des vidéos de communication, des reportages et documentaires pour le marché national et international. Le groupe breton, déjà opérateur des télévisions Tébéo et Tébésud, fortement engagé dans la production de vidéos digitales, renforce ainsi ses capacités dans les formats longs vidéo, le brand content et les vidéos corporate. 

Groupe SIPA-Ouest France : lancement de Ouest France  TV, au plus tard au 1er septembre 2025, suite à l’obtention d’une fréquence TNT par l’Arcom (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) en juillet dernier.

En octobre Ouest-France a lancé la chaîne YouTube Kolok. Des formats longs, en immersion, spécialement pour attirer les 18-25 ans, déclinés aussi sur Tiktok, Instagram et Snapchat, avec un accent mis sur le divertissement.

Sudouest.fr propose une nouvelle page d’accueil. Au menu, un fil dédié à l’actualité locale, nationale et internationale et un espace vidéo enrichi (reportages, analyses, interviews, etc.). Cette rénovation du site est le résultat d’un travail collaboratif (rédaction, marketing, design, technique) et d’une consultation auprès des lecteurs du quotidien régional. 


Groupe Centre France fait évoluer ses applis mobiles dans ses quotidiens avec une interface plus ergonomique et fonctionnelle et plusieurs nouveautés : plus de contenus, grands formats, dossiers spéciaux, vidéos, rubriques Sports, Économie, Loisirs. La version numérique du journal pour les abonnés directement dans le menu, accès aux archives des précédentes éditions. Tous les contenus sont désormais accessibles en audio.


Groupe Nice-Matin (repris en 2020 par NJJ Holding de Xavier Niel) est engagé depuis l’été 2023 dans le projet européen #IQMedia dédié à l’innovation dans les médias.

Groupe La Dépêche du Midi : Midi Olympique est livré désormais depuis septembre dès le lundi matin dans l’Ouest de la France grâce à l’ouverture du nouveau centre d’impression d’Héric (Loire-Atlantique). Le groupe Dépêche a aussi pris 5 % dans le capital de DC Company (Konbini, Le Gorafi) avec un partenariat autour des axes de développement éditorial, publicitaire et technologique.

DIVERTO : PREMIER BILAN 

Le nouveau magazine télé, supplément de fin de semaine lancé début janvier dans 50 quotidiens régionaux et départementaux regroupés au sein d’un GIE a publié ses premiers résultats. Sur quatre parutions, le tirage moyen est supérieur à 3,4 millions d’exemplaires chaque semaine. La DFP (diffusion France payée) officielle, enregistrée par l’ACPM est supérieure à 3,2 millions. Un chiffre comparable avec l’ancien TV Magazine du groupe Figaro, disparu fin décembre en raison de la rupture des contrats avec la PQR.

En réaction à cette décision, le Figaro s’est associé au Parisien lancer un nouveau magazine vendu en supplément des deux quotidiens pour un tirage de 530.000 ex.


MAGAZINES TÉLÉ : LA GUERRE EST DÉCLARÉE ! 



Diverto paraît le 6 janvier 2023 à plus de 3 millions d’exemplaires. Il va remplacer le TV Magazine fourni depuis 1987 à la PQR par le groupe Figaro, l a haus s e des coût s de fabrication et du papier ayant entrainé la rupture des contrats passés avec la presse régionale. Le nouvel hebdomadaire se veut un média global. 

Il a pour vocation de mieux correspondre aux nouvelles manières de regarder la télé. Avec l’avènement des plateformes, du replay et la généralisation des smartphones, il n’y a plus une seule façon de regarder le petit écran, peut-on lire dans son argumentaire. 

Hebdo de fin de semaine de 84 pages (dont 10 à 13 de pub), avec des vidéos et des podcasts, il est consacré au divertissement, à la musique, aux spectacles, aux jeux vidéo, à la télé, aux écrans et plateformes. 


Son modèle économique est basé sur la mutualisation des coûts : un GIE s’est constitué autour de six groupes de presse (plus de 50 titres quotidiens avec Centre France, EBRA, Sud Ouest, Rossel, La Dépêche du Midi et Sipa Ouest-France) pour financer le projet dont la réalisation a été confiée à Antoine Daccord, 40 ans (IPJ, ESSEC). Il a travaillé pour le groupe Figaro, a dirigé le numérique chez RTL de 2013 à 2019 et de 2019 à 2021 pour le groupe Combat

Il y a moins de un an, il avait fondé Cosmo38, une société spécialisée dans le conseil éditorial, stratégique et marketing. Il débuta comme reporter de 2000 à 2006 aux quotidiens Le Populaire et L’Écho à Limoges, après avoir étudié la sociologie à l’université. 


Rédaction en chef : Roxane Centola (ex-responsable publishing Altice Media). Une équipe de 30 personnes, dont une dizaine de journalistes, a préparé le lancement. 


LANCEMENT DU Figaro TV Magazine 


Le groupe Figaro ne baisse pas les bras face à cette nouvelle concurrence. 

Également à partir de janvier il lance avec Le Parisien un nouveau supplément TV diffusé le week-end. Deux poids lourds de la presse nationale qui, pour la première fois, font cause commune. 


Dénommé Le Figaro TV Magazine il est piloté par François Aubel, 50 ans, rédacteur en chef culture-télé print-web au Figaro (ex-red chef du Magazine Littéraire 2007-2010. Journaliste à Libé, Le Monde, et le JDD). 


La rédaction compte une quinzaine de journalistes spécialisés. Les 14 salariés du TV Mag bénéficient d'un PSE et plusieurs seront reclassés dans le groupe Figaro


Consacré à la télé et aux plateformes, ce nouveau titre sera diffusé à 530.000 ex. sur 60 à 64 pages. Pour mémoire, la diffusion 2021-2022 du TV Mag dépassait les 3.880.000 exemplaires. Un objectif de reconquête est donc fixé. 

Au sein de l’offre week-end du Figaro, il sera aussi distribué avec Le Parisien le vendredi sous le titre Le Parisien TV Magazine. Hors Ile-de-France et Oise, il ne sera pas commercialisé avec Aujourd’hui en France, privilégiant ainsi Le Figaro. Parmi les nouveautés : les grilles des programmes télé commenceront à partir du samedi, et non plus du dimanche. Les grilles quotidiennes sont ramenées à cinq pages, au lieu de sept. Après l’édito, quelques coulisses et indiscrétions, deux ou trois pages seront consacrées aux contenus disponibles sur les grandes plateformes. Portraits, enquêtes et reportages seront complétés par cinq pages de jeux (au lieu de 2 dans le TV Magazine). 



SÉNAT : UN RAPPORT POUR RÉNOVER LA PQR

20 juillet 2022 :
le Sénat publie un rapport d'information, réalisé par la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, intitulé "Accompagner la rénovation de la presse quotidienne régionale". 

La PQR, lue chaque mois par 43 millions de lecteurs, est vu comme "un maillon essentiel de la vie locale et de la démocratie" mais elle a subi ces dernières années un triple choc : assèchement de ses ressources et de son lectorat par les plateformes numériques, la pandémie qui a accéléré l'érosion des ventes, la très forte hausse de ses coûts de production du fait de l'explosion du prix du papier. 

Le rapport dresse un constat lucide estimant que la PQR, longtemps protégée par la fidélité de son lectorat, a plus tardé que d'autres types de presse à réaliser les investissements nécessaires à son développement. Fragilisée, la PQR reste diverse et enracinée dans les spécificités des territoires. Les sénateurs concluent à "la nécessité pour l'État d'accompagner le secteur dans sa mutation, sans pour autant se substituer aux éditeurs dans la redéfinition de leur modèle économique".

On objectera que la PQR est encore très largement soutenue par l'État par le biais des multiples aides à la presse. Les aides à la modernisation ont notamment permis d'accélérer les mutations technologiques, et l'actuel "plan de filière" vise à concentrer les moyens d'impression.

Ces dernières années, les groupes de presse qui possèdent les journaux régionaux ont tous diversifié leurs recettes pour faire face à l'érosion des lecteurs et de la publicité. Les retards, constatés au niveau des investissements, s'expliquent surtout par la faiblesse capitalistique et les freins syndicaux qui, traditionnellement corporatistes, ont souvent ralenti les nécessaires évolutions.





EMMANUEL MACRON ANNONCE SA CANDIDATURE DANS LA PQR









3 mars 2022 : Emmanuel Macron annonce sa candidature pour un second mandat, aux élections du 10 et 24 avril, dans une lettre aux Français publiée dans la presse quotidienne régionale.

En choisissant la PQR, le candidat s'adresse à une cible potentielle de 20 millions de lecteurs, avec ses déclinaisons digitales, soit 81 % de la population française de plus de 15 ans.

La PQR, qui représente 35 % de la diffusion de la presse française, compte 52 quotidiens (régionaux et départementaux), 46 sites web et applications mobiles.

La presse quotidienne nationale ne représentant que 12 % de la presse française.


Seule, La Voix du Nord n’a pas publié l’intégralité de la « lettre » : « publier in extenso dans notre journal serait établir un déséquilibre entre les candidats (…) Nous ferons de même si d’autres candidats nous transmettent un tel texte » a expliqué Patrick Jankielewicz, rédacteur en chef du quotidien. 

Ironie de l’histoire, c’est dans La Voix du Nord que Jacques Chirac annonça sa candidature en novembre 1994 pour l’élection de 1995, par un entretien exclusif.


1965 : pour la première élection au suffrage universel direct, Charles de Gaulle l’avait fait depuis l’Élysée dans un discours officiel retransmis par la télévision. 

1981 : Valéry Giscard d’Estaing  a aussi choisi la formule de l’allocution télévisée. 

1988 : François Mitterrand répond d’un simple « oui » à la question posée lors d’une interview sur Antenne 2.

2002 : Lionel Jospin, Premier ministre de la cohabitation, envoie un simple fax à l’AFP. Jacques Chirac profitera d’un déplacement à Avignon pour répondre à la question habilement posée par la maire de la ville.

2012 : Nicolas Sarkozy choisit le journal de 20 h de TF1, deux mois avant le premier tour.

2016 : François Hollande annonce depuis l’Élysée qu’il ne se représente pas.


PRESSE QUOTIDIENNE RÉGIONALE

  Extrait de PRESSE&MÉDIAS juin-juillet 2025