Quand s'arrêtera la descente aux enfers de la presse écrite française ? Erosion des ventes, publicité en berne, révolution numérique balbutiante... Les entreprises cherchent un nouveau modèle économique. Etat des lieux et perspectives d'avenir.
> On assiste à un phénomène mondial.
2015 : la diffusion de la presse française a baissé de 3,8 % par rapport à 2014 |
" D'ici trois ou quatre ans, vous pourriez voir le modèle économique du journal imprimé ne plus être rentable " estime l'analyste Tom Hartman, de Standard and Poor's.
Déjà, en 2010, un an avant sa mort, l'américain James Tyree, propriétaire du Chicago Sun Times limitait à " une décennie la durée de survie des journaux "Print", avant d'être remplacés par les journaux numériques ".
2020... On y est presque !
> La presse écrite s'engage timidement dans la révolution numérique qui bouleverse ses métiers et ses organisations.
Un virage générationnel qui reste lent faute d'investissements suffisants mais aussi à cause du conservatisme de la profession, longtemps réticente aux mutations technologiques.
Cette révolution n'a pas encore pris toute la mesure des nouveaux modes de transmission de l'information (applications pour smartphones, tablettes, interactivité des réseaux sociaux) et des nouvelles formes d'écriture (richmedia, webmagazines, TV Web etc.)
> En France, cette crise structurelle est amplifiée par la crise économique qui amplifie le phénomène des concentrations et précarise la profession.
Ces crises n'en finissent pas d'affaiblir la presse écrite qui révèle son incapacité à imaginer un nouveau modèle économique viable.
> Dès les années soixante, la presse a été confrontée à la concentration des titres. Un phénomène darwinien qui se poursuit car les entreprises dépréciées, souvent à bout de souffle, sont rachetées par des groupes qui n'ont pas d'autre solution que d'incontournables mutualisations.
Ainsi, on compte une dizaine de groupes de presse régionale. La concentration influe nécessairement sur le pluralisme.
5 % des points de vente disparaissent chaque année (photo TN) |
Une situation qui révèle la faiblesse majeure des entreprises : leur sous-capitalisation.
Dans l'incapacité de procéder aux investissements indispensables à leur survie, leur modernisation et leur développement, la plupart des entreprises de presse se sont contentées de vivre dans l'assistanat des aides de l'Etat, sans craindre de nuire à leur indépendance financière et éditoriale.
> L'avenir s'annonce sombre pour la presse écrite française aux mains de groupes avides de pouvoir, les déficits permettant aux holdings de bénéficier de substantiels avantages fiscaux.
> Parce que le virage du digital s'engage enfin, d'importantes décisions affaiblissent un peu plus la profession. Voici une liste non exhaustive des situations les plus tendues :
SNIC Paris Normandie : le 15 mars 2017, on connaîtra le repreneur du groupe (le PDG Xavier Ellie semble tenir la corde au détriment du groupe Rossel).
La Voix du Nord : le plan social s'engage (55 journalistes supprimés).
La Marseillaise a déposé le bilan fin novembre 2016 et son redressement judiciaire pour six mois se termine en mai.
La Dépêche-Midi Libre : 350 emplois vont disparaître dans la mutualisation des deux groupes.
SPIR Communication : 62 M€ de pertes. La filiale de Ouest-France a liquidé ses actifs. Dernier en date : Logic Immo cédé au groupe Springer.
Nice-Matin : 100 emplois supprimés d'ici 2019 (ouverture d'un guichet de départ en avril prochain).
La Nouvelle République du Centre-Ouest : les "petits actionnaires" n'ont toujours pas vendu leurs 25 % du capital.
Sud Ouest : gestation d'un plan destiné à économiser 10 M€.
SFR Media : courant mars, le groupe de Patrick Drahi annoncera l'avenir qu'il réserve à son pôle presse (Libération, L'Express, L'Expansion, L'Etudiant, NextRadioTV, i24news).
Le Figaro filialise ses services généraux...
Marianne a déposé le bilan et son redressement judiciaire se termine en juillet...
La presse écrite française se meurt !
Thierry Noël
Journaliste honoraire (carte n° 38013)
(*) Observatoire des métiers de la presse 2011 - groupe prospective animé par Jean-Marie Charon - Association mondiale des éditeurs de journaux)
> 2016 : UNE CHUTE DES VENTES ABYSSALE
La diffusion de la presse française accuse en 2015 une baisse de 3,8 % par rapport à 2014.
COMMENT EN EST-ON ARRIVE LA ?
> 2002 : LA PRESSE D'INFO GRATUITE S'INSTALLE
> 2011 : DEUX QUOTIDIENS DISPARAISSENT
LA TRIBUNE ET FRANCE SOIR
> LA PRESSE ECRITE PEUT-ELLE ENCORE REBONDIR ?
> LA CONCENTRATION DES 11 GROUPES REGIONAUX
En achuré, les zones de concurrence entre les groupes régionaux (infographie Le Figaro) |
Les quotidiens régionaux et les principaux quotidiens départementaux |
Les principaux quotidiens régionaux français |