jeudi 27 juin 2024

AUDIOVISUEL PUBLIC

FAUT-IL PRIVATISER ?

 

Engloutie par la dissolution de l’Assemblée, la réforme de l’audiovisuel public reste un sujet majeur de l’après-législatives. Privatiser : le RN prône l’étalement…


Le texte porté par la ministre de la Culture Rachida Dati devait être examiné le 24 juin. Ajourné une première fois le 23 mai pour cause d’embouteillage parlementaire, il prévoyait la mise en place d’une holding commune aux différentes sociétés au 1er janvier 2025, puis une fusion en 2026. 

Ce projet de réforme, largement contesté par les salariés de France Télévisions, Radio France, l'Ina et France Médias Monde, a été voté en première lecture par le Sénat. 

La prochaine Assemblée devra trancher…

En agitant le spectre de la privatisation, le RN a jeté un pavé dans la marre : le 10 juin, Sébastien Chenu, vice-président du RN, expliquait sur BFMTV et RMC que la privatisation était une priorité  : « La privatisation du service public de l'audiovisuel, c'est 3 milliards d’euros d’économies ». Trois jours plus tard, la réforme ne figurait pas dans les huit promesses de campagne de Jordan Bardella comme s’il ne s’agissait plus d’une priorité…  Et pour cause, l’intention de privatiser a aussitôt fait chuter les cotations de TF1 ( - 7 %) et M6 ( - 3,1 %) en Bourse. Ces incertitudes nées de la dissolution traduisent aussi les risques de forte déstabilisation des marchés publicitaires. 

Privatiser suppose de remplacer des fonds publics par des fonds privés, provenant essentiellement des recettes publicitaires. Or, avec un budget de 2,6 milliards d’euros, France Télévisions frise le niveau de l’ensemble de la pub télé en France, estimé à 3 Md€. La privatisation totale s’avère donc impossible à moins d’une lourde restructuration pour réduire la voilure, une source de conflit social qu’aucun gouvernement ne veut subir.

Le réalisme l’emportant, le RN a nuancé ses engagements par un étalement dans le temps plutôt que l’urgence. Sur France 3 le 16 juin, Jordan Bardella parle d’une « ambition » qui reste d’actualité, « celle à terme de privatiser l’audiovisuel public pour faire des économies (…) Evidemment, ça ne se fait pas en 24 h ».


Contre la privatisation, Adèle Van Reeth, directrice de France Inter, affirmait le 12 juin que « la radio allait se battre contre un éventuel projet de privatisation de l’audiovisuel public. Je demande à tous les politiques qui voudraient soit nous soutenir, soit nous nuire, juste de nous lâcher. Il faut arrêter. » 

La privatisation inquiète d’autant plus qu’elle serait contraire à la nouvelle législation européenne (Media Freedom Act) adoptée en mars dernier, qui protège largement les audiovisuels publics… 

Les milieux professionnels ont aussi pris position : dans une tribune, 41 organisations du secteur de la création ont qualifié de « dangereux » le projet de privatisation souhaité par le RN : «  Télé et radio publiques sont, entre autres, les premiers partenaires d'une filière qui compte plus de 300.000 salariés » soulignent les signataires où l’on retrouve l'Union syndicale de la production audiovisuelle (USPA), l'association des producteurs d'animation AnimFrance, l'Union des réalisatrices et réalisateurs (U2R) et l'Union des producteurs de cinéma (UPC).


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> Laurence Bloch quitte Radio France 


Laurence Bloch, 71 ans, directrice des antennes et de la stratégie éditoriale de Radio France, va quitter le groupe public au 1er juillet. Première femme à avoir dirigé France Inter de 2014 à 2022, elle avait succédé à Philippe Val, dont elle était l’adjointe, et a été remplacée par Adèle Van Reeth. Après Sciences Po, et un stage à France Inter en 1978, elle débuta à France Culture avant de devenir correspondante en Afrique australe pour RFI et La Croix. Nommée directrice adjointe de France Culture en 1989, elle a rejoint France Inter en 2010. Sous sa direction, elle a rajeuni et féminisé l’antenne devenue première radio de France.


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