ARTÉMIS

POINT DE VUE : LA HOLDING DE FRANÇOIS PINAULT MAJORITAIRE 

Le groupe Artémis de François Pinault devient l’actionnaire majoritaire de l'hebdomadaire people Point de Vue en rachetant les participations minoritaires du consortium ‘’Royalement vôtre’’ formé en 2018. Il réunissait Artémis, le fonds d’investissement IDI, Audacia (Charles Beigbeder), Stéphane Bern et Adelaïde de Clermont-Tonnerre, directrice de la rédaction. Elle reste présente symboliquement dans le capital du journal des têtes couronnées qui fêtera ses 80 ans en 2025. 

En 2018, Point de Vue avait été cédé par le groupe Altice.

Point de Vue, DFP 2022-2023 : 110.203 exemplaires ( - 4,29 %)

Audience OneNext Access Cible 15+ : plus de 3 millions de lecteurs

REPÈRES

François Pinault, 87 ans, est avec sa famille la 3e fortune française avec 40,1 Md€ (classement Forbes 2023) derrière Bernard Arnault et sa famille (LVMH) 211 Md€, et Françoise Bettencourt Meyers 80,5 Md€.

Artémis est déjà propriétaire depuis 1997 du newsmagazine Le Point et l’actionnaire majoritaire du groupe de luxe Kering (Gucci, Yves Saint Laurent, Bottega Veneta, Boucheron, Balenciaga, Alexander McQueen). Il possède aussi la maison d’enchères Christie’s, les éditions Tallandier, des vignobles dans le Bordelais, le club de football du Stade Rennais. 

En 2003, il passe le relais à son fils François-Henri Pinault, né en 1962.

Breton autodidacte (il a quitté l’école à 16 ans), François Pinault débuta en 1962 dans le négoce de bois et deviendra leader du secteur. 

Spécialisé dans la reprise d’entreprises en difficulté, il créé le groupe Pinault-Printemps-Redoute en 1994 et devient majoritaire dans le capital de la Fnac de 1994 à 2017. 

En 1999, il prend le virage du luxe. En 2000, il rachète l’agence économique L’Agefi qu’il revendra en 2019 au groupe Bey Medias de Nicolas Beytout. Collectionneur d’art, il a créé le Palazzo Grassi à Venise en 2006. 

En 1945, pour remplacer Match placé sous séquestre, Point de Vue avait été lancé par des anciens des Forces Françaises Libres, dont Marcel Bleustein-Blanchet, fondateur de Publicis.

LE PALMARES SANTÉ DU POINT CENSURÉ…

17 novembre : « Quand l’État et la CNIL censurent l’information sur notre système de santé ». L’hebdomadaire Le Point se voit interdire la publication de son palmarès annuel des hôpitaux et cliniques. Impossible d’accéder à la base de données PMSI (Programme de médicalisation des systèmes d’information) qui mesure officiellement l’activité des établissements de santé. Cette base contient les dossiers anonymes des 28 millions de patients hospitalisés chaque année.

Cette censure de fait a été décidée par le Comité éthique et scientifique pour les recherches, les études et les évaluations dans le domaine de la santé (Cesrees). Un organisme « indépendant » dont les membres sont nommés par les ministères de la Santé et de la Recherche. La CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés) s’est rangée à son avis, considérant que le « classement » n’avait pas « d’intérêt public » avec des résultats « risquant d’induire les patients en erreur ».

Le Point rappelle que la loi du 29 juillet 1881, sanctuarise la liberté de la presse en France : « tout journal ou écrit périodique peut être publié, sans autorisation au préalable ». Pour l’hebdomadaire, « la critique de notre méthodologie n'est qu'un prétexte. En réalité, il s'agit de mettre au pas ces journalistes qui osent dire que tous les établissements de soins ne sont pas égaux en qualité et indiquent ceux où il vaut mieux se faire soigner. Un crime de comparaison pour tous les apparatchiks du système assis sur leurs tas de données, dont il n'est pas question de se servir pour éclairer les patients, pourtant financeurs de tout le système. »

Déjà, en 1998, le gouvernement avait tenté d’interdire l’accès à ces informations. (Martine Aubry était ministre de la Santé). Face au tollé, le projet d’avis ministériel avait été retiré. En 2015, suite à l’instauration d’un comité de contrôle préalable à l’accès aux données, une autre ministre (Marisol Touraine) avait calmé le jeu en soulignant « le professionnalisme » des journalistes qui établissent ces palmarès.

En raison de l’absence de réaction de l’actuel ministre de la Santé (François Braun) Le Point indique « lancer les recours juridiques les plus adaptés contre cette censure ». Le Pr Guy Vallancien, de l’Académie de médecine, s’est insurgé contre la décision prise à l’encontre du newsmagazine.

LE POINT : CRISE AU SOMMET 

14 octobre 2022 : Sébastien Le Fol, 48 ans (Université Panthéon-Sorbonne) directeur de la rédaction du Point depuis 2014 a été écarté de l’hebdomadaire. (photo ci-contre, dr)

Son départ est la réplique sismique de 

« L’affaire Zemouri » - du nom du journaliste Aziz Zemouri qui avait publié en juin 2022 une fausse information mettant en cause le couple de députés de La France insoumise Raquel Garrido et Alexis Corbière -. 

L’article sera retiré le lendemain et une enquête interne a entraîné la mise à pied de son auteur.

Le directeur du Point, Etienne Gernelle a rendu hommage à son confrère sur Twitter : « Un immense merci à Sébastien Le Fol qui va quitter Le Point dans quelques semaines. » 

S. Le Fol avait débuté comme stagiaire au Figaro Littéraire en 1995. Devenu reporter un an plus tard, il accède à la rédaction en chef du Figaro Magazine en 2005. De 2008 à 2013 il sera directeur adjoint de la rédaction du Figaro. 

D’origine bretonne (Vannes), il est aussi éditorialiste au quotidien régional Le Télégramme depuis novembre 2021. 

Valérie Toranian, 60 ans, lui succède et prendra ses fonctions d’ici la fin de l’année. Elle dirigeait La Revue des Deux Mondes depuis fin 2014, une revue de littérature fondée en 1829, qui appartient depuis 1991 à Marc Ladreit de Lacharrière, président de Fimalac, une holding influente dans le secteur numérique, le divertissement, l’immobilier, le capital investissement, l’hôtellerie et les loisirs. Précédemment, elle a été rédactrice en chef de Elle en 1998 puis directrice de la rédaction de 2002 à 2014. En 2011, elle a tenu une chronique sur Canal + dans « La Nouvelle Émission ». Petite-fille d’Arméniens rescapés du génocide turc, elle signe ses premiers articles dans le magazine féminin en 1989. 

Depuis 2018 elle est l’épouse de Franz-Olivier Giesbert, (CFJ 1971), journaliste-éditorialiste, grand reporter, homme de radio et de télévision, qui a été notamment directeur de la rédaction du Nouvel Observateur, puis de 1988 à 2000 directeur des rédactions du Figaro, avant de diriger Le Point jusqu’en 2017, pour devenir directeur éditorial de La Provence jusqu’en 2021. 

Depuis plusieurs mois, Le Point connaît une « valse » au sommet de sa rédaction : Jérôme Béglé, directeur adjoint de la rédaction depuis 2014, est parti en janvier à la direction de la rédaction du JDD. Florent Barraco rédacteur en chef du point.fr depuis 2019, lui a succédé mais ce dernier est parti au Figaro comme directeur adjoint du site figaro.fr. 

> Le Point, diffusion France payée 2021-2022 : 308.669 ex. + 13,2 % / 2020 

Repères 

Le Point a été fondé en 1972 par des journalistes venus de L’Express en s’inspirant du Time américain. (ci-contre le n°1)

Hachette était alors l'actionnaire principal.

L’hebdo, classé au centre-droit, appartient depuis 1997 à François Pinault, fondateur de la holding Artemis et de Kering (ex-PPR, Pinault-Printemps-Redoute) (photo AFP) 

27e fortune mondiale (42,3 Md$ au classement Forbes 2020), 4e fortune française (32 Md€ au classement Challenges 2020). 

Né en 1936 dans les Côtes d’Armor, il grandit dans la scierie familiale. À partir de 1962, il créé un véritable empire du bois et lors du choc pétrolier de 1976, les cours du bois s’effondrent. Par la suite, il rachète tous ses concurrents, notamment Isoroy en 1986 et en 1987 le producteur de papier journal Chapelle Darblay. 

Entré en bourse en 1988, Pinault rachète Conforama à Bernard Arnault et la holding propriétaire des magasins du Printemps. 

1994 : il fusionne avec La Redoute et reprend 64,6 % de la Fnac. 

1998 : rachat du Stade Rennais et de la maison de vente aux enchères Christie’s. Vincent Bolloré lui cède 12,6 % de parts qu’il détient dans Bouygues. 

2000 : il complète son intérêt pour les médias en rachetant le groupe L’Agefi. 

2013 : participation (2 %) au capital de la société de production Cinémaphore de l’actrice Julie Gayet. Son virage dans le monde du luxe remonte à 1999-2000 avec l’achat de Gucci, Boucheron, Sanofi Beauté qui possède Yves Saint-Laurent. Il rachète également le Théâtre Marigny et possède aussi plusieurs vignobles prestigieux en France et en Californie. 

2003 : la présidence d’Artémis est cédée à son fils François-Henri et regroupe l’ensemble des activités dans Kering. Remarié en 1970 avec une antiquaire de Rennes, il s’initie au monde de l’art (sa collection de 5000 oeuvres est estimée à 1,4 Md$). À défaut de pouvoir installer un musée sur l’île Seguin (ancien siège des usines Renault), il rachète le Palazzo Grassi à Venise, inauguré en 2006. 

2016 : financement de la transformation de la Bourse de commerce de Paris en musée d’art contemporain (120 M€) ouvert en mai 2021.

2018 : Adélaïde de Clermont-Tonnerre, associée à Artémis, Audacia (Charles Beigbeder), IDI et Stéphane Bern, reprend pour 11,8 M€ à SFR Presse (Altice) le magazine hebdo Point de Vue édité par Royalement Vôtre Éditions.

En 1945, pour remplacer Match, placé sous séquestre, Point de Vue a été lancé par des anciens des Forces Françaises Libres, dont Marcel Bleustein-Blanchet, fondateur de Publicis. En 1948, son concurrent Images du Monde sorti fin 1944 avec le soutien financier d’Emilien Amaury, le rachète et devient Point de Vue - Images du Monde. 

En faillite, Laure Boulay de la Meurthe, arrière petite-fille du Duc de Guise, et Jimmy Goldsmith, vont relancer le magazine en 1986. Sa plus forte vente de 850.000 exemplaires, en 1997, correspond à la mort de Lady Di, la Princesse de Galles. Kering distribue 70,4 % de ses actions de l’équipementier sportif Puma pour se concentrer sur le luxe. 

2019 : après l’incendie de Notre-Dame de Paris, F. Pinault débloque 100 M€ pour sa reconstruction. 

Ami personnel du couple Chirac, il mettra à leur disposition un hôtel particulier parisien, rue de Tournon, où l’ancien président décèdera en septembre 2019. 

2021 : F. Pinault rachète l’hôtel de Cavoye, rue des Saint-Pères (80 M€), ancienne résidence de Bernard Tapie. Ami personnel du couple Chirac, le milliardaire mettra à leur disposition un hôtel particulier parisien, rue de Tournon, où l’ancien président décèdera en septembre 2019. 

Chiffres clés 

Depuis 2017, la société d’exploitation de l’hebdo Le Point ne publie plus ses comptes. 

CA 2017 : 67,8 M€ Artemis CA 2020 : 8,012 M€ ( + 0,52 % / 2019)

Résultat net : 289,470 M€ 

Siège social 1, Bd Victor 75015 Paris 

www.lepoint.fr 

www.groupeartemis.com